Accueil


I


 

idiomatismes - illustrateurs du Cantal en langue française - intercompréhension.

 

IDIOMATISME

Construction ou tournure particulière à une langue. L'auvergnat est une langue à idiomatismes fortement différenciés tant du français que des langues d'oc méridionales : voir des exemples innombrables dans le Nouveau dictionnaire général français - auvergnat : comparaisons, images, faits syntaxiques les plus divers. Parmi ces constructions particulières, celles de prépositions sont les plus originales : voir P. Bonnaud : Grammaire générale de l'auvergnat à l'usage des arvernisants (Chamalières, Cercle Terre d'Auvergne 1992). Il n'est pratiquement pas exagéré de dire qu'aucune phrase auvergnate ne se construit comme en français, provençal, languedocien, etc... Il faut bien mesurer qu'avec les particularités du vocabulaire c'est une des deux difficultés essentielles de la bonne acquisition de la langue, la grammaire étant par ailleurs très régularisée. Mais l'étude des idiomatismes auvergnats, originaux, savoureux, vaut la peine et procure de grandes satisfactions. Voir P. Bonnaud : Nouveau dictionnaire général français-auvergnat, éditions CREER à Nonette et les rubriques de la revue Bïzà Neirà : En bon auvergnat, Phraséologie auvergnate (articles répandus sur de nombreux numéros). Voir publications.

 

ILLUSTRATEURS LITTéRAIRES DU cantal en langue française

On ne saurait trop regretter que les dialectes auvergnats nord-cantaliens du Sanflorain et du Mauriacois aient eu peu d'expression littéraire. De grandes richesses se sont ainsi perdues. A côté de Marie-Aimée Méraville, qui a suppléé au plus près à ce manque tant son français s'enracine dans le parler vernaculaire de son enfance, le Cantal du Nord a cependant fourni des illustrations remarquablement évocatrices chez plusieurs écrivains de langue française. Ils ont écrit pour la plupart en émigration, ce qui a pu aiguiser leur nostalgie ou exalter l'idée qu'ils se faisaient du pays natal et de ses gens. La diversité des tempéraments permet de couvrir un vaste spectre de l'identité de la Haute-Auvergne, ce qui mériterait bien une anthologie.

  • Jean Ajalbert (1863 - 1947) né - et enterré - à Bredons, avocat à Paris, romancier exotique à succès et membre de l'Académie Goncourt, fut aussi un défenseur vigoureux des Auvergnats de Paris, contribua de manière décisive au succès d'Arsène Vermenouze et regroupa ses écrits les plus significatifs dans un recueil de synthèse, Auvergne (1939).
  • Gandilhon Gens d'Armes (1871 - 1948), né à Murat d'une famille de Lavigerie, devenu fonctionnaire à Paris, créateur de la Veillée d'Auvergne (1909), collaborateur assidu de L'Auvergnat de Paris, a fait flamboyer le pays des volcans avec une violence épique dans ses Poèmes arvernes: Fresques et Médaillons (1927), La Légende des Monts et des Hommes (1932). Roger Gardes (in : Auvergne, Encyclopédie Bonneton 1985) a justement souligné que c'est "une véritable Légende des Siècles auvergnate" et relevé "le ton épique, le vocabulaire coloré, le rythme ample de l'alexandrin [qui] animent cette vision de l'Auvergne intégrale". Par ce style, il date parfois, mais la force du verbe, la puissance des images emportent malgré tout l'adhésion. Comme Ajalbert, il ferrailla beaucoup pour l'Auvergne, sa langue, sa dignité : outre ses innombrables chroniques dans L'Auvergnat de Paris on peut souligner par exemple la justesse des réflexions qu'il donne dans la préface à Flour de Mountagno de Benezet Vidal (un poète banal).
  • Léon Boyer (1883 - 1916), né à Falgères de Marchastel, mais instituteur à Cusset, sut aussi tirer de l'alexandrin beaucoup mieux que maint rimailleur attardé dans les exercices scolaires. Malgré un titre peu engageant, Genêts et rocailles, recueil posthume car il fut tué à la bataille de Verdun, réunit des pièces d'une grande justesse de ton et où le sentiment profond du pays sublime la description.
  • Voir à l'article Artense la recension de l'oeuvre très forte de Léon Gerbe qui, n'hésitant pas à forcer le trait à la manière d'un véritable sculpteur maniant le burin, atteint parfaitement son but qui est de donner de l'Artense un portrait en relief fait de force et de drame, bien apte à marquer l'esprit du lecteur (Au pays d'Artense, in : L'Auvergne Littéraire n° 63, mai-juillet 1932, de Bussac, Clermont-Ferrand).
  • Quant à Pierre Besson, il nous restitue une image à la fois familière et dramatique de la vie montagnarde et pastorale dans le haut pays de Cheylade dans Un pâtre du Cantal (Paris, Delagrave 1914) dont le sommet est l'histooire tragique du "paure Barbat" qu'on ne saurait oublier après l'avoir lu (ayant eu le malheur de trouver avariée une partie de sa production de fromage, il alla la jeter au loin; mais trahi par des paroles prononcées dans son sommeil, il se suicide).

Le Cantal continue à inspirer des auteurs de langue française actuellement. Nous manquons encore de recul pour faire la distinction entre ce qui est pure localisation d'une fiction romanesque et ce qui peut rester dans les mémoires par une typicité identitaire apte à emporter l'adhésion des générations qui se succèdent.

 

Intercompréhension

C'est la compréhension mutuelle, chacun parlant dans son langage propre. Une intercompréhension véritable ne se limite pas à des échanges embryonnaires, mais doit s'étendre à l'ensemble de ce qu'on dit. C'est pourquoi l'affirmation de l'intercompréhension entre les langues d'oc (voire le catalan !) est un leurre ou un bluff propagandiste, surtout lorsqu'il s'agit de l'auvergnat, langue - charnière dont le versant septentrional en particulier est lié étroitement à l'aire médioromane. L'intercompréhension était plus large et plus facile autrefois en Auvergne même, lorsque les gens parlaient l'auvergnat toute la journée, avec tous les interlocuteurs, en tous lieux (foires et marchés, etc...) : leur oreille était habituée aux différences et leur cerveau établissait automatiquement les correspondances. L'usage sporadique de la langue, son repli sur un milieu restreint (famille, amis, générations âgées d'un même village), le recul de l'oralité au profit de l'écrit qui ossifie, voire accentue les différences, provoquent la résorption de ces formes spontanées d'intercompréhension. Même avec le secours d'une initiation appropriée par l'étude ou l'enseignement, les exigences de la vérité contraignent à dire qu'elle ne va pas de soi dans toute l'Auvergne (quant à celle dans la prétendue aire d'oc, ce n'est rien d'autre qu'une pétition de principe sans aucune concrétisation solide dans la réalité). Quatre phonétiques (occidentale et orientale, septentrionale et méridionale), la fragmentation des parlers et les évolutions spécifiques de l'aire limagnaise, le fort particularisme du Cantal du Nord (Sanflorain et plus encore Mauriacois à cause de la spécificité de son vocabulaire) sont les obstacles principaux. Il ne faut pas se complaire dans les illusions : ils ne pourraient être entièrement surmontés que par ceux qui se rallieraient au moins dans l'usage culturel et relationnel à une forme commune de langue (voir ALEP) dont avait déjà rêvé Ch. A. Ravel (voir avernat). Aussi, pour le public extérieur, même sympathisant, il est plus réaliste et d'ailleurs bénéfique de faire tout pour la perpétuation des formes dialectales (sinon étroitement locales) de la langue auvergnate, en tant qu'instrument inégalable d'enracinement identitaire et de conscience de la dignité de notre héritage régional particulier (notre "bien propre" selon Pierre-Jakez Hélias).

 


A - B - C - D - E - F - G - H - I - J - K - L - M - N - O - P - Q - R - S - T - U - V - W - X - Y - Z


CERCLE TERRE D'AUVERGNE - LANGUES ET CIVILISATIONS AUVERGNATES
11, rue des Saulées - 63400 Chamalières
Courriel : auvergnelangueciv [@] yahoo.fr (supprimez les crochets)